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14 octobre 2019

Synode pour l'Amazonie (5) : ouverture

Noëlie Djimadoumbaye, Religieuse xavière, membre du Ceras

Synode pour l'Amazonie (5) : ouverture

« Le Synode pour l’Amazonie : une table que Dieu a préparée pour ses pauvres, et il nous demande de servir cette table » (Cardinal Hummes).

La célébration du synode pour l’Amazonie a commencé. Dans cet article, nous reviendrons sur quelques grandes lignes des allocutions du pape François, du Cardinal Claudio Hummes (Président du REPAM, le Réseau ecclésial pan-amazonien et Rapporteur général du synode pour l’Amazonie) et du cardinal Lorenzo Baldisseri (Secrétaire Général du Synode des Evêques) à l’occasion de l’ouverture de ce synode.

Les participants au synode

Tous les prélats de la région amazonienne ont été convoqués à participer à la célébration de ce synode. Cela témoigne de la volonté du pape François de travailler de manière plus effective à la collégialité qui est l’esprit même du synode. De plus, le noyau principal constitué des 137 évêques de la région panamazonienne est élargi avec la participation des chefs des dicastères de la curie romaine (13) ; des délégués fraternels et représentants d’autres Églises particulières et communutés ecclésiales (6) ; des religieux élus par l’Union des Supérieurs généraux (15) ; des invités spéciaux (12) choisis pour leur compétence scientifique ou leur appartenance à des organismes et associations humanitaires ou écologiques provenant de pays et d’aires géographiques impliquées dans les mêmes problématiques que celles du synode (notamment le bassin du Congo) ; des experts (25) désignés en vertu de leurs compétences pour contribuer aux travaux synodaux en tant que collaborateurs des Secrétaires spéciaux ; des auditeurs (55) dont 16 représentants de diverses ethnies indigènes et 10 religieuses présentées par l’Union Internationale des Supérieures Générales[1] en raison du témoignage de la vie consacrée féminine en Amazonie.

La diversité des participants à ce synode montre l’implication de toute l’Eglise universelle dans ce synode régional, rendant ainsi bien visibles les dimensions locale et universelle de ce synode.  

Les principaux thèmes du synode

Pour le pape François, le Synode pour l’Amazonie comporte quatre dimensions : la dimension pastorale, la dimension culturelle, la dimension sociale et la dimension écologique. Toutefois, l’essentiel du synode se résume à sa dimension pastorale. C’est l’annonce de l’Evangile qui est primordial et qui donne sens à toutes les autres actions de l’Eglise. Or l’histoire de l’Église en Panamazonie montre qu’il y a toujours eu une grande pénurie de ressources matérielles et de missionnaires qui ont pour conséquence la quasi-absence de l’Eucharistie et d’autres sacrements essentiels à la vie chrétienne de tous les jours. L’Eucharistie n’est célébrée que deux fois par an dans certaines communautés ! Ceci constitue un grand obstacle au plein épanouissement des communautés. Tout en reconnaissant la valeur du célibat des clercs dans l’Église, les communautés autochtones ont demandé que soit ouverte la voie à l’ordination sacerdotale des hommes mariés. De même, considérant le nombre important de femmes responsables de communautés chrétiennes amazoniennes et en raison de la qualité des services qu’elles rendent à leur communauté, il est demandé que leur participation soit reconnue et renforcée par la création d’un ministère spécial pour les femmes. Enfin, l’Eglise en Amazonie s’est distinguée par de grands services fondamentaux rendus à la population locale au niveau de l’éducation, de la santé, de la lutte contre la pauvreté et contre la violation des droits de l’homme. Lors des consultations, les peuples autochtones exhortent l’Eglise à être leur fidèle alliée pour la défense de leurs droits et la construction de leur avenir.

Toutes ces préoccupations sont regroupées en quelques thèmes principaux sur lesquels les pères synodaux réfléchissent : a) l’Eglise en sortie en Amazonie et ses nouvelles voies ; b) le visage amazonien de l’Eglise : inculturation et interculturalité en milieu missionnaire ecclésial ; c) le ministère dans l’Eglise d’Amazonie : presbytérat, diaconat, ministères, le rôle de la femme ; d) l’action de l’Eglise dans le soin de la Maison commune : écouter la terre et les pauvres ; écologie intégrale : environnementale, économique, sociale et culturelle ; e) l’Eglise amazonienne dans la réalité urbaine ; f) la question de l’eau ; g) Autres. Ces différents thèmes reprennent les grandes orientations pastorales du Pape François qu’on retrouve notamment dans Evangelii Gauduum, Laudato si et Amoris laetitia avec l’intuition principale d’une Eglise en sortie, en chemin, d’une Eglise des pauvres et pour les pauvres, d’une Eglise servante qui prend soin de tous, spécialement des plus vulnérables et de notre maison commune.  

Quelques attitudes synodales

Contempler : tous les participants aux synodes sont invités à contempler tout à la fois la beauté et la fragilité de ce jardin d’immenses richesses humaines et culturelles qu’est l’Amazonie. Il s’agit de voir la réalité de l’Amazonie avec ce cœur pastoral, avec des yeux de disciples et de missionnaires, car la préoccupation majeure est l’annonce du Seigneur.

Ecouter : « Le Synode des Évêques doit aussi devenir toujours plus un instrument privilégié d’écoute du Peuple de Dieu : Nous demandons, tout d’abord, à l’Esprit Saint, le don de l’écoute pour les Pères synodaux : écoute de Dieu, jusqu’à entendre avec Lui le cri du Peuple ; écoute du Peuple, jusqu’à y respirer la volonté à laquelle Dieu nous appelle » (Episcopalis communio 6). A cet effet, le pape François tient à rappeler que le synode n’est ni une table ronde, ni conférence, ni une discussion, et moins encore un parlement ou un parloir avec des jeux de pouvoir.  Le synode est écoute commune de l’Esprit Saint, le principal protagoniste du synode à ne pas oublier, ni chasser hors de la salle synodale. La prudence, la fraternité, la délicatesse, l’humour, le climat de silence et de prière sont nécessaire pour favoriser cette écoute commune de l’Esprit à travers le cri des pauvres et de la terre d’Amazonie.

Respecter : le cardinal Hummes parle d’approcher les peuples amazoniens sur la pointe des pieds, en respectant leur histoire, leurs cultures, leur style de bien-vivre car ils ont une identité et une sagesse propre qui façonnent une manière de sentir, une façon de voir la réalité et qui font d’eux les protagonistes de leur histoire.

Répondre : avec un cœur de pasteurs et de serviteurs que Dieu invite à servir à la table des pauvres de l’Amazonie. C’est le Christ bon pasteur qui doit être le modèle des pères synodaux. Pour cela, les pères synodaux sont invités à ne pas céder à une attitude autoréférentielle mais à répondre avec une prudence audacieuse au cri de l’Amazonie.

Un synode aux couleurs écologiques

L’écologie est l’un des grands axes du synode pour l’Amazonie. La Secrétairerie Générale des synodes a voulu faire de la célébration de ce synode un évènement écologique à travers quelques initiatives en faveur de la durabilité environnementale afin de préserver de la pollution et protéger la Maison Commune. Le synode ne réfléchit donc pas seulement sur l’écologie mais engage une démarche de cohérence écologique. Ainsi une nouvelle pratique d’inscription a permis aux participants au synode de s’enregistrer directement en ligne. Cette initiative a favorisé la fluidité de la communication et surtout une importante économie de papier imprimé. Il a aussi été décidé de l’usage des matériaux biodégradables pendant le déroulement du Synode, les objets en plastiques étant proscrits. Par exemple, le sac et les stylos mis à la disposition des participants sont en fibre naturelle et le papier utilisé provient de filière de transformation certifiée. Enfin, ce synode veut poser un geste écologique symbolique en visant un Impact nul. Est donc prévu l’achat de titres de boisement pour le reboisement de 50 hectares de forêt du bassin amazonien en compensation de 572.809 kg de CO2 (438.373 kg pour les voyages aériens et 134.435 kg pour les autres activités) des émissions générées, lors de ce synode, par la consommation d’énergie, d’eau, par l’équipement, par la mobilité des participants, etc.  

 

[1] C’est la première fois que l’union Internationale des Supérieures Générales a une représentation à un synode contrairement à l’Union des Supérieurs Généraux.

Pour aller plus loin

Allocution d’ouverture du pape François : http://w2.vatican.va/content/francesco/it/speeches/2019/october/documents/papa-francesco_20191007_apertura-sinodo.html

Rapport du Card. Lorenzo Baldisseri, Secrétaire Général du synode des évêques : http://press.vatican.va/content/salastampa/it/bollettino/pubblico/2019/10/07/0781/01592.html

Allocution du card. Claudio Hummes, Rapporteur général du synode pour l’Amazonie : http://press.vatican.va/content/salastampa/it/bollettino/pubblico/2019/10/07/0782/01593.html#es

Constitution apostolique Episcopalis communio sur le synode des évêques : http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/apost_constitutions/documents/papa-francesco_costituzione-ap_20180915_episcopalis-communio.html