Les principes fondamentaux de la Doctrine sociale de l’Eglise Catholique et leur actualité : dignité humaine, subsidiarité, solidarité, bien commun, option prioritaire pour les plus pauvres, destination universelle des biens et développement humain intégral, depuis le Concile Vatican II jusqu’au Pape François.
Pourquoi proposer un parcours sur certains principes fondamentaux de la Doctrine sociale de l’Eglise (DSE) précisément dans le cadre d’un séminaire sur la paix et à partir du Concile Vatican II ?
Quelques réponses rapides.
Le Concile Vatican II (oct. 1962 – déc. 1965) mériterait d’être situé dans son délicat contexte géopolitique dont voici certains enjeux : la construction de la paix en Europe et en Asie après la 2de Guerre Mondiale ; la décolonisation ; la Guerre Froide entre deux ‘blocs’ mais aussi la tentative d’un troisième positionnement pour certains pays ‘non–alignés’ ; le développement des Nations Unies.
Le Concile marque un renforcement dans l’approche aux questions sociales dans la Curie Romaine et plus généralement l’Eglise Catholique. A la lumière de plusieurs importants documents notamment de la Constitution Gaudium et Spes (d’autres seront cités dans les pages suivantes) une série de ‘dicastères’ (à savoir des ministères aidant le Pape dans son service à la tête de l’Eglise) sont créés. Par exemple : le Conseil Pontifical « Justice et Paix », le Conseil Pontifical « Cor Unum », le Conseil Pontifical pour les Communications Sociales. Plus tard (1994) ce sera le tour de l’Académie Pontificale pour les Sciences Sociales et de l’Académie Pontificale pour la Vie qui viennent rejoindre la célèbre Académie Pontificale pour les Sciences.
Comme l’explique la susmentionnée Constitution Gaudium et Spes, « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur ». En raison de la foi chrétienne, l’indifférence n’est point possible. Comme le pape François précisera, « au cœur même de l’Évangile, il y a la vie communautaire et l’engagement avec les autres »[i].
Ce qui sera maintenant présenté découle bien entendu de la foi chrétienne, de la mission évangélisatrice de l’Eglise. La DSE offre « les principes de réflexion, les critères de jugement et les directives d’action sur la base desquels promouvoir un humanisme intégral et solidaire. Diffuser cette doctrine constitue, par conséquent, une priorité pastorale authentique, afin que les personnes, éclairées par celle-ci, soient capables d'interpréter la réalité d’aujourd’hui et de chercher des voies appropriées à l’action »[ii]. C’est ce qu’explique le Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise, publié en 2004, dont le pape François a recommandé « vivement l’utilisation et l’étude »[iii]. Cet ouvrage est une présentation « manière globale et systématique, bien que sous une forme synthétique »[iv] des enseignements (essentiellement des Papes) qui composent la DSE ; « un instrument au service du discernement moral et pastoral des événements complexes (…) un guide pour inspirer, au niveau individuel et collectif, des comportements et des choix qui permettent de regarder vers l’avenir avec confiance et espérance »[v].
Néanmoins il est important de souligner que cet instrument, et plus généralement la DSE, sont proposés à toutes les personnes de bonne volonté, non uniquement aux catholiques ou aux chrétiens. En effet ces principes sont ancrés dans une profonde réflexion anthropologique qui n’est pas le privilège de l’Eglise. D’autres personnes et organisations peuvent mener ces mêmes considérations et partager donc ces principes. L’examen de plusieurs grandes traditions de sagesse morale entrepris par la Commission Théologique Internationale « atteste que certains types de comportements humains sont reconnus, dans la plupart des cultures, comme exprimant une certaine excellence dans la manière pour l’homme de vivre et de réaliser son humanité : actes de courage, patience devant les épreuves et les difficultés de la vie, compassion pour les faibles, modération dans l’usage des biens matériels, attitude responsable vis-à-vis de l’environnement, dévouement au bien commun… Ces comportements éthiques définissent les grandes lignes d’un idéal proprement moral d’une vie ‘selon la nature’, c’est-à-dire conforme à l’être profond du sujet humain. Par ailleurs, certains comportements sont universellement perçus comme objets de réprobation : meurtre, vol, mensonge, colère, convoitise, avarice… Ils apparaissent comme des atteintes à la dignité de la personne humaine et aux justes exigences de la vie en société »[vi]. Dans toutes les cultures et sagesses, nous pourrions dire, se retrouve une certaine ‘grammaire’ innée sur ce qui devrait être typiquement humain ! Cela étant dit, il faut préciser que la présentation des principes de la DSE qui suit ne saurait être exhaustive, et inévitablement elle comporte un certain risque de répétition puisque ces principes sont étroitement imbriqués.
Nous habitons une même planète, notre maison commune, sa morphologie et ses mécanismes environnementaux précèdent nos frontières politiques et administratives, nous partageons ses ressources dont nous dépendons. Or, la préoccupation pour l’état de cette Terre désormais nous inquiète : cela concerne toutes les nations, les cultures, les ethnies et les religions. Cette inquiétude est très forte sous le pontificat de Paul VI, notamment dans ses discours et ses écrits entre 1967 et 1973.
Nous avons en commun une inquiétude commune au sujet de la maison commune. Nous sentons que ce qui devrait permettre la vie et l’épanouissement des générations qui se suivent est en péril. L’humanité « par une exploitation inconsidérée de la nature (…) risque de la détruire »[vii]. Or nous sentons que tous devraient – dans une même génération et dans toutes les générations – pouvoir profiter des biens de la Terre. Ceux-ci nous apparaissent comme conçus pour une destination universelle. Cette destination universelle des biens (DUB) est à la fois :
· Une approche, à savoir être convaincus que les ressources de la Terre sont conçues afin d’être partagées et utilisées de façon solidaire et soutenable ;
· Un processus, à savoir la somme des efforts nécessaires afin de réaliser un tel partage et une telle utilisation.
Prenons deux exemples très différents. La DUB a été appliquée aux océans[viii] (années ‘70) puis au sol[ix], donc à une réalité fluctuante et traditionnellement soumise au droit international (la haute mer) et a une réalité bien plus palpable, soumise souvent carrément aux lois qui régissent la propriété privée.
Comment ménager, respecter, protéger les océans afin que leur destination universelle soit assurée ? Que d’enjeux ! Tutelle de la biodiversité ; quotas de pêche ; possibilité de mener des études scientifiques ; accès aux ressources minières et hydrocarbures ; navigation de bateaux touristiques commerciaux ou militaires ; querelles géopolitiques et menaces de piraterie, …
Comment discerner et décider au sujet de l’utilisation des sols : agriculture, exploitation de gisements, génération d’énergie, urbanisation, jachère et respect de la biodiversité ? Chaque parcelle demande une prise de décision méticuleuse, qui tienne en considération les réalités et les demandes du niveau local, aussi bien que du niveau national, et le cas échéant même transfrontalier et régional. Comment faire en sorte que les sols soient au service de tous, tout en respectant « la capacité de régénération de chaque écosystème »[x]?
Jean-Paul II précisa : « Le droit à la propriété privée est valable et nécessaire, mais il ne supprime pas la valeur de ce principe. Sur la propriété, en effet, pèse ‘une hypothèque sociale’, c’est-à-dire que l'on y discerne, comme qualité intrinsèque, une fonction sociale fondée et justifiée précisément par le principe de la destination universelle des biens »[xi].
Venons-en à « l’option ou l’amour préférentiel pour les pauvres. C’est là une option, ou une forme spéciale de priorité dans la pratique de la charité chrétienne dont témoigne toute la tradition de l’Eglise. Elle concerne la vie de chaque chrétien, en tant qu’il imite la vie du Christ, mais elle s’applique également à nos responsabilités sociales et donc à notre façon de vivre, aux décisions que nous avons à prendre de manière cohérente au sujet de la propriété et de l’usage des biens »[xii].
Ce principe illumine, par exemple, les proclames des Nations Unies en cette année 2019, ‘ne laisser personne pour compte’ (leaving no one behind en anglais[xiii]) à l’occasion de la journée de l’eau (22 mars) et de l’imminente journée de l’assainissement (19 novembre). Se préoccuper des plus pauvres, de ceux qui sont écartés ou discriminés « de droit ou de fait, à cause de leur race, leur origine, leur couleur, leur culture, leur sexe ou leur religion »[xiv], à cause de barrières linguistiques ou dues au handicap, ou à l’âge, des prisonniers ou plus simplement des laissés pour compte par « la corruption et les intérêts d’une économie qui exclut et qui tue »[xv].
La pauvreté est souvent multidimensionnelle. Pauvreté économique, carences de formation et d’instruction, peu de contacts donc ‘ne pas avoir de réseaux’ sur lequel s’appuyer et ainsi être isolé, pas d’accès aux soins et aux institutions. Peu d’affection reçue, et peu de possibilités de démontrer de l’affection et de l’attachement : pauvre en tendresse. Ne peut-on concevoir un lien entre pauvreté en famille (orphelins, enlèvements d’enfants, familles déchirées, violences et abus en famille, …) et à termes difficultés dans la vie sociale et économique ? Et outre, si l’on est migrant, on finit également par perdre ses repères culturels. Multi-dimensionnellement pauvre, une personne tombe plus facilement dans les griffes des escrocs, usuriers, dans les diverses formes de dépendance (de l’abus de substances aux addictions liées à Internet), des recruteurs de ‘chair humaine à exploiter’ (la prostitution et la pornographie, le travail forcé, les milices et enfants soldats, le trafic d’organes).
Remarquons que les pauvres, d’après l’expérience du pape François, « ne se contentent pas de promesses illusoires, d’excuses ou d’alibis. Ils n’attendent pas non plus les bras croisés l’aide d’ONG, des programmes d’aide ou des solutions qui n’arrivent jamais ou qui, si elles arrivent, le font en ayant tendance soit à anesthésier, soit à apprivoiser, et cela est plutôt dangereux. Vous sentez que les pauvres n’attendent plus et veulent être acteurs ; ils s’organisent, étudient, travaillent, exigent et surtout pratiquent la solidarité si spéciale qui existe entre ceux qui souffrent, entre les pauvres, et que notre civilisation semble avoir oublié, ou tout au moins a très envie d’oublier »[xvi]. Partout où cela est possible, il ne faut donc pas se limiter à l’assistanat, mais favoriser et encourager le protagonisme de ces personnes, leur inclusion, leur témoignage (nous en reparlerons lors de la subsidiarité).
Prenons encore les enseignements de François : « La solidarité est un mot qui ne plaît pas toujours ; (…) mais un mot est beaucoup plus que certains gestes de générosité ponctuels. C’est penser et agir en termes de communauté, de priorité de la vie de tous sur l’appropriation des biens de la part de certains. C’est également lutter contre les causes structurelles de la pauvreté, de l’inégalité, du manque de travail, de terre et de logement, de la négation des droits sociaux et du travail. C’est faire face aux effets destructeurs de l’Empire de l’argent : les déplacements forcés, les émigrations douloureuses, la traite de personnes, la drogue, la guerre, la violence et toutes les réalités que beaucoup d’entre vous subissent et que nous sommes tous appelés à transformer. La solidarité, entendue dans son sens le plus profond, est une façon de faire l’histoire »[xvii].
C’est ce que Saint Paul VI passait en revue dans le chapitre consacré au développement solidaire de l’humanité au sein de sa puissante encyclique Populorum progressio. « Le développement intégral de l’homme ne peut aller sans le développement solidaire de l’humanité. (…) ‘l’homme doit rencontrer l’homme, les nations doivent se rencontrer comme des frères et sœurs, comme les enfants de Dieu. Dans cette compréhension et cette amitié mutuelles, dans cette communion sacrée, Nous devons également commencer à œuvrer ensemble pour édifier l’avenir commun de l’humanité (…)’ »[xviii]. Paul VI encourageait « la recherche de moyens concrets et pratiques d’organisation et de coopération, pour mettre en commun les ressources disponibles et réaliser ainsi une véritable communion entre toutes les nations » en soulignant qu’un tel devoir « concerne en premier lieu les plus favorisés. Leurs obligations s’enracinent dans la fraternité humaine et surnaturelle et se présentent sous un triple aspect : devoir de solidarité, l’aide que les nations riches doivent apporter aux pays en voie de développement ; devoir de justice sociale, le redressement des relations commerciales défectueuses entre peuples forts et peuples faibles; devoir de charité universelle, la promotion d’un monde plus humain pour tous, où tous auront à donner et à recevoir, sans que le progrès des uns soit un obstacle au développement des autres. La question est grave, car l’avenir de la civilisation mondiale en dépend »[xix]. Il est question de ‘devoirs’ ! Et Jean-Paul II parle d’une ‘obligation morale’ : « les responsables des affaires publiques, les citoyens des pays riches, chacun à titre personnel (…) ont l’obligation morale - à leur niveau respectif de responsabilité - de tenir compte, dans leurs décisions personnelles et gouvernementales, de ce rapport d’universalité, de cette interdépendance existante entre leur comportement et la misère et le sous-développement de tant de millions d’hommes »[xx]. La solidarité doit donc de façon responsable et charitable guider les choix des investisseurs, des inventeurs, des entrepreneurs, des politiciens, des éducateurs, … Il ne saurait être question de continuer dans des choix et comportements inéquitables, cyniques et nuisibles. Ni même pas de se confiner à l’indifférence : ‘cela ne me concerne pas, je n’ai rien fait de mal’. Dans la fameuse parabole du riche qui menait joyeuse vie et du mendiant Lazare, le riche n’a rien fait de mal expressément contre Lazare, il s’est ‘limité à l’indifférence’ et rien que pour cela il est condamné[xxi].
Cela évoque un principe souvent utilisé dans les négociations internationales au sujet du climat : ‘les responsabilités communes mais différenciées’. Nous pourrions ainsi parler de ‘justice contributive’ afin que chacun participe à l’effort commun, de ‘justice commutative’ afin qu’il y ait une équité dans les échanges sans que le plus faible soit lésé ou humilié, et de ‘justice restauratrice’ afin, par exemple, que ceux qui ont le plus pollué s’attèlent à restaures tel ou tel écosystème. Prenons un cas concret : en ce qui concerne l’énergie, les pays les plus riches et industrialisés ont « le devoir moral de développer l’utilisation des technologies énergétiques les plus complexes et à plus grande intensité en capital, afin de permettre aux [autres pays] d’alimenter leur développement, en recourant aux technologies énergétiques les plus simples et les moins coûteuses »[xxii].
La subsidiarité est un principe qui s’applique au gouvernement. Elle « protège les personnes des abus des instances sociales supérieures et incite ces dernières à aider les individus et les corps intermédiaires à développer leurs fonctions. Ce principe s’impose parce que toute personne, toute famille et tout corps intermédiaire ont quelque chose d’original à offrir à la communauté »[xxiii], une compétence, une efficacité, et une connaissance particulière. Conséquemment, « toutes les sociétés d’ordre supérieur doivent se mettre en attitude d’aide (subsidium) — donc de soutien, de promotion, de développement — par rapport aux sociétés d’ordre mineur. De la sorte, les corps sociaux intermédiaires peuvent remplir de manière appropriée les fonctions qui leur reviennent, sans devoir les céder injustement à d’autres groupes sociaux de niveau supérieur, lesquels finiraient par les absorber et les remplacer et, à la fin, leur nieraient leur dignité et leur espace vital. À la subsidiarité comprise dans un sens positif, comme aide économique, institutionnelle, législative offerte aux entités sociales plus petites, correspond une série d’implications dans un sens négatif, qui imposent à l’Etat de s’abstenir de tout ce qui restreindrait, de fait, l’espace vital des cellules mineures et essentielles de la société. Leur initiative, leur liberté et leur responsabilité ne doivent pas être supplantées »[xxiv].
Ce principe est très présent dans l’enseignement des papes, même avant le Concile Vatican II. Il garde toute sa pertinence en ce début de XXI siècle. Que l’on pense au rôle des villes et des mairies, des syndicats, du monde associatif, des corporations et des coopératives, des mouvements de jeunesse, des diocèses, des fédérations d’entreprises, … Tous ces acteurs ont une responsabilité, un rôle à jouer. La première cellule qui doit être protégée et aidée est bien entendu la famille, avec ses nombreuses spécificités et son indéniable et irremplaçable rôle. Benoît XVI écrivait : « Les programmes de développement, pour pouvoir être adaptés aux situations particulières, doivent être caractérisés par la flexibilité. Et les personnes qui en bénéficient devraient être directement associées à leur préparation et devenir protagonistes de leur réalisation » ; donc, « dans les interventions en faveur du développement, le principe de la centralité de la personne humaine doit être préservé car elle est le sujet qui, le premier, doit prendre en charge la tâche du développement »[xxv].
La subsidiarité demande, par exemple, que l’on considère sans aprioris négatifs les systèmes traditionnels et ancestraux de gestion des sols, des forêts, des zones de pêche. C’était là une question présente aussi au sein du Synode consacré à la région Amazonie qui vient de se terminer. Déjà Gaudium et spes considérait que « fréquemment, dans des sociétés économiquement moins développées, la destination commune des biens est partiellement réalisée par des coutumes et des traditions communautaires, garantissant à chaque membre les biens les plus nécessaires. Certes, il faut éviter de considérer certaines coutumes comme tout à fait immuables, si elles ne répondent plus aux nouvelles exigences de ce temps ; mais, à l’inverse, il ne faut pas attenter imprudemment à ces coutumes honnêtes »[xxvi]. Les communautés aborigènes, souvent, « quand elles restent sur leurs territoires, ce sont précisément elles qui les préservent le mieux. Cependant, en diverses parties du monde, elles font l’objet de pressions pour abandonner leurs terres afin de les laisser libres pour des projets d’extraction ainsi que pour des projets agricoles et de la pêche, qui ne prêtent pas attention à la dégradation de la nature et de la culture »[xxvii]. A ce propos, la FAO a adopté en 2012 des Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale. Les Directives n. 5.6, 7.1 et 7.3 – en particulier – méritent d’être lues en ce qui concerne la subsidiarité.
La DSE insiste sur une saine « articulation de l’autorité politique au niveau local, national et international »[xxviii], sur l’importance des « différentes dimensions qui vont du groupe social primaire, la famille, en passant par la communauté locale et la Nation, jusqu’à la vie internationale. À l’intérieur de chacun des niveaux sociaux et entre eux, se développent les institutions qui régulent les relations humaines. Tout ce qui leur porte préjudice a des effets nocifs, comme la perte de la liberté, l’injustice et la violence. Divers pays s’alignent sur un niveau institutionnel précaire, au prix de la souffrance des populations et au bénéfice de ceux qui tirent profit de cet état des choses »[xxix]. Indéniablement, un seul Etat n’est pas en mesure de régler efficacement tous les défis. Jean XXIII put constater que « dans les conditions actuelles de la communauté humaine, l’organisation et le fonctionnement des États aussi bien que l’autorité conférée à tous les gouvernements ne permettent pas, il faut l’avouer, de promouvoir comme il faut le bien commun universel »[xxx]. Parfois le niveau bilatéral ou régional semble pertinent et efficace : c’est l’intuition de la « Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux (Convention sur l’eau) adoptée en 1992 à Helsinki, Finlande, [qui] est un mécanisme de renforcement des mesures nationales et de la coopération internationale pour la gestion écologique et la protection des eaux transfrontières de surface ou souterraines »[xxxi]. Reconnaissons également la nécessité d’une coopération rapide en cas d’épidémie, comme les résurgences d’Ebola l’ont montré.
Cependant, il arrive que le niveau international soit requis : « des problèmes de dimensions mondiales (…) ne peuvent être résolus que par une autorité publique dont le pouvoir, la constitution et les moyens d’action prennent eux aussi des dimensions mondiales (…). C’est donc l’ordre moral lui- même qui exige la constitution d’une autorité publique de compétence universelle »[xxxii]. Jean XXIII considéra la Déclaration universelle des droits de l’homme « comme un pas vers l’établissement d’une organisation juridico-politique de la communauté mondiale » et désira que l’ONU puisse « de plus en plus adapter ses structures et ses moyens d’action à l’étendue et à la haute valeur de sa mission »[xxxiii]. Entre reconnaitre les imperfections de l’ONU, ses gâchis, certains dérapages idéologiques et sa lenteur à se reformer, d’une part, et suggérer sa disparition d’autre part, il y a un pas qu’il vaut mieux éviter de franchir. Concrètement, pensons au besoin d’une action à l’échelle mondiale pour le désarmement, pour les quotas de pêche, pour la lutte à la criminalité financière et à la criminalité online, pour le droit international concernant la navigation, pour la sauvegarde du climat. « Face au développement irrésistible de l’interdépendance mondiale (…) il est urgent que soit mise en place une véritable Autorité politique mondiale (…). Une telle Autorité devra être réglée par le droit, se conformer de manière cohérente aux principes de subsidiarité et de solidarité, être ordonnée à la réalisation du bien commun »[xxxiv].
« Dans un monde en proie à l’incertitude, nous devons rester fidèles à des principes moraux. La dignité et les droits inhérents à chaque individu doivent être à l’origine de toute notre action et permettre d’en mesurer la réussite. La complexité croissante du monde ne devrait rien ôter à cette vérité. C’est le fondement même des sociétés saines et des Etats forts, la base d’un ordre international plus juste et plus stable »[xxxv]. Ces mots percutants sont de la précédente Directrice Générale de l’UNESCO, mais « si nous considérons la dignité humaine à la lumière des vérités révélées par Dieu, nous ne pouvons que la situer bien plus haut encore »[xxxvi].
Cette « inaliénable dignité humaine »[xxxvii] appartient à toute personne, dès la conception. Ne la prenons pas à la légère car « une société juste ne peut être réalisée que dans le respect de la dignité transcendante de la personne humaine. Celle-ci représente la fin dernière de la société, qui lui est ordonnée »[xxxviii]. Quatre implications à ce sujet.
· « En aucun cas la personne humaine ne peut être manipulée à des fins étrangères à son développement », ne peut « être finalisée à des projets de caractère économique, social et politique »[xxxix], réduite à un vote, à un client, à une somme d’énergie, à un être optionnel, ‘sacrifiable’, ou qui pourrait être réalisé ‘sur commande’ et programmable comme les dérives techno-scientifiques le laissent espérer à certains lorsque « au progrès technique ne correspond pas un progrès dans la formation éthique »[xl].
· Les droits et les devoirs trouvent leur racine dans cette dignité humaine ; ils sont universels, inviolables, et doivent être promus ensemble[xli]. « L’Eglise a fourni une contribution importante, et même décisive, par son engagement en faveur de la défense et de la promotion des droits de l’homme : dans des milieux fortement imprégnés d’idéologie, où les prises de position radicales obscurcissaient le sens commun de la dignité humaine, l’Eglise a affirmé avec simplicité et énergie que tout homme, quelles que soient ses convictions personnelles, porte en lui l’image de Dieu et mérite donc le respect »[xlii].
· Il n’y a pas que le misérable, le méprisé, marginalisé et humilié dont la dignité est bafouée. Ce qui est en jeu, c’est en effet aussi la dignité de ceux qui peuvent améliorer la situation et au contraire l’aggravent ou se limitent à des déclarations sans se mouiller. Ils se comportent indignement[xliii].
· La personne est appelée à une vie riche en sens, à « une vocation intégrale »[xliv], une vie ‘en plénitude’ ou ‘en abondance’ comme disait Jésus[xlv]. Dans une vision eschatologique chrétienne, chaque homme et chaque femme « est appelé à une plénitude de vie qui va bien au-delà des dimensions de son existence sur terre, puisqu'elle est la participation à la vie même de Dieu »[xlvi] comme le rappelait Saint Jean-Paul II. « Ce germe de totalité et de plénitude attend de se manifester dans l’amour et de s’accomplir, par un don gratuit de Dieu, dans la participation à sa vie éternelle »[xlvii]. Néanmoins déjà sur Terre, la dignité humaine exige que l’on promeuve un développement humain intégral de chacun, dans le cadre du bien commun de toute la famille humaine. « Il nous est proposé de vivre à un niveau supérieur, et pas pour autant avec une intensité moindre : ‘La vie augmente quand elle est donnée et elle s’affaiblit dans l’isolement et l’aisance’ »[xlviii]. Paul VI explique que « chaque homme est appelé à se développer car toute vie est vocation »[xlix] et que le développement doit « promouvoir tout homme et tout l’homme »[l].
Le développement humain intégral (DHI) considéré certes la dimension économique, mais aussi l’inclusion sociale, la vie familiale et affective, la vie sexuelle, la santé et une saine alimentation, la vie culturelle, l’éducation et la formation, l’accès à la politique et aux institutions, la vie associative, l’accès aux informations et la possibilité d’en diffuser à son tour, la vie religieuse et spirituelle. Telle est la signification de ‘tout l’homme’ : une vision intégrale de la personne et de son développement. Tout est lié ! « Le livre de la nature est unique et indivisible, qu’il s’agisse de l’environnement comme de la vie, de la sexualité, du mariage, de la famille, des relations sociales, en un mot du développement humain intégral »[li].
Et ce n’est pas une simple méthodologie, c’est là aussi une finalité. Paul VI souhaite en effet que chacun puisse « grandir en humanité »[lii] et accéder « à un épanouissement nouveau, à un humanisme transcendant, qui lui donne sa plus grande plénitude : telle est la finalité suprême du développement personnel »[liii]. Il en fait une question de ‘vocation’ cohérente. Osons dire : vocation à la sainteté. Vraiment, le DHI n’est pas une vie évaluée à l’aune de l’économie, du pouvoir d’achat, de la productivité, de la visibilité sociale online (je cite exprès ces critères en vogue et qui semblent avoir acquis une bien trop grande importance). Même l’ONU a fini par reconnaitre (ou a senti le besoin de reconnaitre !) que le produite interne brut ne permet pas de « mesurer le bonheur et le bien-être de la population »[liv]!
Promouvoir ‘tout homme’ rappelle que « chaque homme est membre de la société : il appartient à l’humanité tout entière. Ce n’est pas seulement tel ou tel homme, mais tous les hommes qui sont appelés à ce développement plénier »[lv]. Il s’agit de prendre en considération toute la famille humaine, donc toute notre génération mais aussi la dimension intergénérationnelle. Le bien commun de la famille humaine est « cet ensemble de conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu'à chacun de leurs membres, d’atteindre leur perfection d’une façon plus totale et plus aisée (…).Une société qui, à tous les niveaux, désire véritablement demeurer au service de l’être humain, est celle qui se fixe le bien commun pour objectif prioritaire, dans la mesure où c’est un bien appartenant à tous les hommes et à tout l’homme »[lvi].
Le bien commun n’est pas la raison d’état, ni la volonté d’une majorité, ni une somme improbable des intérêts individuels ; c’est un cheminement collectif et un but de toute la société (les ‘groupes’ dont il est question nous renvoient à la subsidiarité), jamais véritablement atteint. « Tous les individus et tous les corps intermédiaires sont tenus de concourir, chacun dans sa sphère, au bien de l’ensemble. (…) la fonction gouvernementale n’ayant de sens qu’en vue du bien commun, les dispositions prises par ses titulaires doivent à la fois respecter la véritable nature de ce bien et tenir compte de la situation du moment »[lvii].
Cet ‘ensemble’ de conditions reflète la dimension ‘intégrale’ du développement humain, et se retrouve également dans la qualification ‘intégrale’ du 4ème chapitre de l’encyclique Laudato si’ consacré à l’écologie intégrale. Le pape François y passe en revue l’écologie sociale, l’écologie économique, l’écologie environnementale, la bonne santé des institutions, l’écologie culturelle, l’écologie de la vie quotidienne, l’écologie humaine. Voilà une matrice pour l’analyse et l’action.
Le DHI mérite sans doute aucun « l’attention du monde » et représente une question « qui est véritablement ‘trop importante pour être vouée à l’échec’ »[lviii]. Devenir un peuple « demande un processus constant dans lequel chaque nouvelle génération se trouve engagée. C’est un travail lent et ardu qui exige de se laisser intégrer, et d’apprendre à le faire au point de développer une culture de la rencontre dans une harmonie multiforme »[lix]. Cela exige aussi la conscience du fait que « le temps est supérieur à l’espace. Ce principe permet de travailler à long terme, sans être obsédé par les résultats immédiats. Il aide à supporter avec patience les situations difficiles et adverses, ou les changements des plans qu’impose le dynamisme de la réalité. Il est une invitation à assumer la tension entre plénitude et limite, en accordant la priorité au temps. Un des péchés qui parfois se rencontre dans l’activité socio-politique consiste à privilégier les espaces de pouvoir plutôt que les temps des processus. Donner la priorité à l’espace conduit à devenir fou pour tout résoudre dans le moment présent, pour tenter de prendre possession de tous les espaces de pouvoir et d’auto-affirmation. C’est cristalliser les processus et prétendre les détenir. Donner la priorité au temps c’est s’occuper d’initier des processus plutôt que de posséder des espaces. (…) . Il s’agit de privilégier les actions qui génèrent les dynamismes nouveaux dans la société et impliquent d’autres personnes et groupes qui les développeront, jusqu’à ce qu’ils fructifient en évènement historiques importants. Sans inquiétude, mais avec des convictions claires et de la ténacité »[lx].
L’encyclique Laudato si’ propose comme modèle Saint François d’Assise car il « vivait avec simplicité et dans une merveilleuse harmonie avec Dieu, avec les autres, avec la nature et avec lui- même »[lxi]. L’Eglise enseigne que le péché est un élément destructeur, de déchirement, qui a engendré quatre ruptures : de l’homme avec Dieu, avec lui-même, avec ses frères, avec toute la création. Et l’Eglise contribue à la guérison de ses relations, à la réconciliation[lxii]. Dans cette conférence, nous sommes partis de ce qu’il y avait de plus évident, à savoir la situation de la planète et l’inquiétude pour l’environnement que nous avons affrontées à la lumière de la DUB. Il s’agissait initialement de discerner « quelles saines relation nous sommes appelés à établir avec la nature qui nous entoure. Cela porte à s’interroger sur les justes relations à établir avec les autres qui habitent comme nous ou qui habiterons dans la maison commune. Cela exige que nous nous interrogions sur nous-mêmes, notre corps et sa signification, sur le sens de notre vie. Enfin, cela amène à réfléchir au sujet de notre liaison avec Dieu. C’est un ‘parcours de réconciliation’ qui se dessine : démarrer par le plus évident (la crise sociale, écologique, économique et institutionnelle) pour aller vers ce qu’il y a de plus intime »[lxiii]. Démarrer de la DUB pour aller vers la solidarité, l’option préférentielle des pauvres, la dignité humaine, le DHI et ainsi de suite.
L’on peut aussi entreprendre cet itinéraire dans l’autre sens, puisque « l’acceptation de la première annonce, qui invite à se laisser aimer de Dieu et à l’aimer avec l’amour que lui-même nous communique, provoque dans la vie de la personne et dans ses actions une réaction première et fondamentale : désirer, chercher et avoir à cœur le bien des autres »[lxiv]. « Comme l’Eglise est missionnaire par nature, ainsi surgit inévitablement d’une telle nature la charité effective pour le prochain, la compassion qui comprend, assiste et promeut »[lxv].
« L’amour du prochain (…) consiste précisément dans le fait que j’aime aussi, en Dieu et avec Dieu, la personne que je n’apprécie pas ou que je ne connais même pas. Cela ne peut se réaliser qu’à partir de la rencontre intime avec Dieu, une rencontre qui est devenue communion de volonté pour aller jusqu’à toucher le sentiment. (…) L’amour – caritas – sera toujours nécessaire, même dans la société la plus juste. Il n’y a aucun ordre juste de l’État qui puisse rendre superflu le service de l’amour. Celui qui veut s’affranchir de l’amour se prépare à s’affranchir de l’homme en tant qu’homme. Il y aura toujours de la souffrance, qui réclame consolation et aide. Il y aura toujours de la solitude. De même, il y aura toujours des situations de nécessité matérielle, pour lesquelles une aide est indispensable, dans le sens d’un amour concret pour le prochain »[lxvi].
Le dialogue respectueux et la collaboration entre religions peut apporter beaucoup de fruits à ce sujet.
Des valeurs authentiques religieuses offrent la motivation pour la conversion, l’engagement et la persévérance au service du bien commun, des frères et sœurs, même de la sauvegarde de la nature. C’est une cohérence à avoir pour les croyants : « leur unité intérieure de pensée et de dispositions, de manière que toute leur activité soit pénétrée par la lumière de la foi et le dynamisme de l’amour »[lxvii]. En conséquence, « personne ne peut exiger de nous que nous reléguions la religion dans la secrète intimité des personnes, sans aucune influence sur la vie sociale et nationale, sans se préoccuper de la santé des institutions de la société civile, sans s’exprimer sur les événements qui intéressent les citoyens »[lxviii]. « Si nous prenons en compte la complexité de la crise écologique et ses multiples causes, nous devrons reconnaître que les solutions ne peuvent pas venir d’une manière unique d’interpréter et de transformer la réalité. Il est nécessaire d’avoir aussi recours aux diverses richesses culturelles des peuples, à l’art et à la poésie, à la vie intérieure et à la spiritualité. Si nous cherchons vraiment à construire une écologie qui nous permette de restaurer tout ce que nous avons détruit, alors aucune branche des sciences et aucune forme de sagesse ne peut être laissée de côté, la sagesse religieuse non plus, avec son langage propre »[lxix].
Comprendre, promouvoir et enseigner la dignité humaine avec ses implications, rechercher le DHI et cheminer vers le bien commun de la famille humaine en cherchant constamment d’en réaliser l’ensemble des conditions est un chemin vers la paix. Paix et développement sont intimement liés.
Saint Paul VI explique que la « participation efficace des uns avec les autres, dans une égale dignité, pour la construction d’un monde plus humain (…) n’ira certes pas sans effort concerté, constant, et courageux. Mais que chacun en soit bien persuadé : il y va de la vie des peuples pauvres, de la paix civile dans les pays en voie de développement, et de la paix du monde »[lxx]. Il ira jusqu’à exclamer « le développement est le nouveau nom de la paix »[lxxi] ! Benoît XVI garde le cap : « La paix pour tous naît de la justice de chacun »[lxxii]. « La paix est la condition du développement » ajoute Saint Jean-Paul II, tout en précisant que « une paix véritable n’est possible qu’à travers le pardon » car le refus du pardon, « surtout s’il entretient la poursuite de conflits, a des répercussions incalculables pour le développement des peuples. Les ressources sont consacrées à soutenir la course aux armements, les dépenses de guerre, ou à faire face aux conséquences des rétorsions économiques[lxxiii]. Et il précise : « le recrutement des terroristes est (…) plus facile dans les contextes sociaux où les droits sont foulés au pied et où les injustices sont trop longtemps tolérées »[lxxiv].
Le préambule de l’Acte constitutif de l’UNESCO stipule que « c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix ». De telles défenses doivent être orientées autour d’une vision – une saine vision de la personne humaine faite pour vivre en communauté et de l’inaliénable dignité humaine de laquelle découlent droits et devoirs ; une juste et responsable vision de la planète dans laquelle nous habitons tous, cette maison commune. Ces défenses doivent aussi se décliner en habitudes et comportements, notamment une « culture de la rencontre et de la relation »[lxxv], une aptitude à l’écoute, au dialogue, une conscience du fait que « le temps est supérieur à l’espace » comme le rappelle le pape François. En conséquence il faut favoriser la concertation, se donner les moyens d’écouter la voix et les aspirations des personnes et communautés plus vulnérables et marginalisées, et « initier des processus plutôt que de posséder des espaces »[lxxvi] de pouvoir ou de visibilité superficielle. « Pensées, paroles et gestes de paix créent une mentalité et une culture de la paix, une atmosphère de respect, d’honnêteté et de cordialité. Il faut alors enseigner aux hommes à s’aimer et à s’éduquer à la paix, et à vivre avec bienveillance, plus que par simple tolérance »[lxxvii].
Une telle culture de respect et de cordialité et l’attention sans cesse renouvelée aux « petits gestes de sincère courtoisie [qui] aident à construire une culture de la vie partagée et du respect pour ce qui nous entoure »[lxxviii] sont indéniablement un trésor que les parents peuvent transmettre à leurs enfants ; ce rôle des familles doit être secondé par l’école, les mouvements associatifs comme le scoutisme, et les communautés religieuses. Il est néanmoins nécessaire que les Etats aussi s’engagent avec détermination à favoriser cette culture à travers leurs politiques et leurs administrations : dans leurs relations bilatérales et multilatérales, face aux phénomènes migratoires, dans le cas de coexistence difficile entre diverses communautés, lorsque des fractures demandent un temps de réconciliation.
« C’est un travail de longue haleine, parce qu’il suppose une évolution spirituelle, une éducation aux valeurs les plus élevées, une vision neuve de l’histoire humaine. Il convient de renoncer à la fausse paix que promettent les idoles de ce monde et aux dangers qui l’accompagnent, à cette fausse paix qui rend les consciences toujours plus insensibles, qui porte au repliement sur soi, à une existence atrophiée vécue dans l’indifférence. Au contraire la pédagogie de la paix implique action, compassion, solidarité, courage et persévérance », de pardon. Cela permet de pressentir les malaises et les souffrances, de prévenir les crises, de faciliter la médiation et la réconciliation, « de tisser des liens d’appartenance et de cohabitation »[lxxix].
Cette conférence était basée sur la pensée sociale de l’Eglise qui, comme je le disais en introduction, comporte des principes que l’anthropologie et la sagesse devraient permettre à beaucoup si ce n’est à tous d’atteindre, de partager, d’appliquer. Néanmoins, pour finir, nous pourrions laisser la parole à la théologie. Si vous me consentez de résumer grossièrement la finalité de la théologie comme ‘chercher à comprendre qui est Dieu et ce qu’il souhaite de nous’, peut-être j’oserais énumérer les trois maximes suivantes :
Tu as été créé par amour.
Tu es un être limité et tu vas mourir.
Tu seras jugé.
[i] Exhortation Evangelii gaudium 177 (EG 177)
[ii] Conseil Pontifical « Justice et Paix », Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise, Cité du Vatican 2004, § 10.
[iii] Evangelii gaudium, § 184. (EG 184)
[iv] Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise § 8.
[v] Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise § 10.
[vi] A la recherche d’une éthique universelle. Nouveau regard sur la loi naturelle, 2009, § 36.
[vii] Paul VI, lettre apostolique Octogesima adveniens § 21. (OA 21)
[viii] Commission Pontificale « Iustitia et Pax », La destination universelle des biens à propos de la Conférence du droit de la mer, 1979.
[ix] Conseil Pontifical « Justice et Paix », Pour une meilleure répartition de la terre. Le défi de la réforme agraire, 1998.
[x] François, Laudato si’ § 140.(LS 140)
[xi] Encyclique Sollicitudo rei socialis § 42 (SRS 42).
[xii] Sollicitudo rei socialis § 42. (SRS 42)
[xiii] Cf. UNDP, What does it means to leave no one behind? Discussion paper, juillet 2018.
[xiv] Octogesima adveniens § 16.(OA 16)
[xv] François, Message à la Conférence ‘La gouvernance d’un bien commun : l’accès l’eau potable pour tous’ qui s’est déroulée à l’Université Urbaniana le 8 novembre 2018.
[xvi] François, Discours lors de la Rencontre mondiale des mouvements populaires qui s’est déroulée au Vatican le 28 octobre 2014.
[xvii] François, Discours lors de la Rencontre mondiale des mouvements populaires qui s’est déroulée au Vatican le 28 octobre 2014.
[xviii] Populorum progressio § 43.(PP 43)
[xix] Populorum progressio § 44. (PP 44)
[xx] Sollicitudo rei socialis § 9.(SRS 9)
[xxi] Cf. évangile selon Luc 16, 19-31.
[xxii] Conseil Pontifical « Justice et Paix », Energie, Justice et Paix, LEV 2014, pp. 121 et 122.
[xxiii] Compendium § 187.
[xxiv] Compendium § 186.
[xxv] Encyclique Caritas in veritate § 47. (CV 47)
[xxvi] Gaudium et spes § 69.
[xxvii] Laudato si’ § 146.(LS 146)
[xxviii] Caritas in veritate § 41.(CV 41)
[xxix] Laudato si’ § 142.(LS 142)
[xxx] Pacem in terris § 135.(PT 135)
[xxxi] Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (UNECE) - Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux, Guide pour l’application de la Convention sur l’eau, 2016, p. 5.
[xxxii] Pacem in terris § 137. (PT 137)
[xxxiii] Pacem in terris § 144, 145. (PT 144)
[xxxiv] Caritas in veritate § 67.(CV 67)
[xxxv] Irina Bokova, Message à l’occasion de la Journée des droits de l’homme, 10 décembre 2010.
[xxxvi] Pacem in terris § 10.(PT 10)
[xxxvii] Jean-Paul II, Discours au corps diplomatique, 3 mai 1989, § 5.
[xxxviii] Compendium § 132.
[xxxix] Compendium § 133.
[xl] Benoît XVI, encyclique Spe salvi § 22.
[xli] Cf. Pacem in terris § 9-38 (PT 9) ; Compendium § 152-157.
[xlii] Jean-Paul II, encyclique Centesimus annus § 22. (CA 22)
[xliii] Cf. Laudato si’ § 160.(LS 160)
[xliv] Gaudium et spes § 11, 57, 63.
[xlv] Cf. évangile selon Jean 10, 10.
[xlvi] Encyclique Evangelium vitae § 2.
[xlvii] Evangelium vitae § 31.
[xlviii] Evangelii gaudium § 10.(EG 10)
[xlix] Populorum progressio § 15.(PP 15)
[l] Populorum progressio § 14.(PP 14)
[li] Caritas in veritate § 51.(CV 51)
[lii] Populorum progressio § 15.(PP 15)
[liii] Populorum progressio § 16.(PP 16)
[liv] Cf. Résolution A/RES/65/309 de l’Assemblée Générale, 2011.
[lv] Populorum progressio § 17. (PP 17)
[lvi] Compendium § 164, 165.
[lvii] Pacem in terris § 53, 54.(PT 53)
[lviii] Benoît XVI, Discours lors de la rencontre à Westminster Hall, 17 septembre 2010.
[lix] Evangelii gaudium § 220.(EG 220)
[lx] Evangelii gaudium § 222-223. (EG 222)
[lxi] Laudato si’ § 10.(LS 10)
[lxii] Cf. Jean-Paul II, exhortation Reconciliatio et paenitentia § 4, 26.
[lxiii] Tebaldo Vinciguerra, Baptisés : quelles motivations pour prendre soin de la création, dans ‘Diaconat Aujourd’hui’, n°202, octobre 2019, p. 12.
[lxiv] Evangelii gaudium § 178.(EG 178)
[lxv] Evangelii gaudium § 179.(EG 179)
[lxvi] Benoît XVI, encyclique Deus caritas est § 18 et 28.
[lxvii] Pacem in terris § 152; (PT 152) cf. Deus caritas est § 19-34.
[lxviii] Evangelii gaudium § 183 (EG 183)
[lxix] Laudato si’ § 63. (LS 63)
[lxx] Populorum progressio § 55.(PP 55)
[lxxi] Populorum progressio § 87 (PP 87)
[lxxii] Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix 2012 § 5.
[lxxiii] Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix 2002 § 9.
[lxxiv] Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix 2002 § 5.
[lxxv] François, Discours lors de la rencontre avec la Classe dirigeante du Brésil, Rio de Janeiro, 27 juillet 2013, § 1.
[lxxvi] Exhortation Evangelii gaudium § 223.(EG 223)
[lxxvii] Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale de la paix 2013, § 7.
[lxxviii] Laudato si’ § 213 (LS 213)
[lxxix] Laudato si’ § 149 (LS 149).